Accès aux soins de santé pour les patients atteints de paludisme – Enjeux en Côte d’Ivoire

Accès aux soins de santé pour les patients atteints de paludisme - Enjeux en Côte d'Ivoire

En Côte d’Ivoire, près d’un habitant sur deux vit à plus de 5 km d’un établissement de santé. Une réalité qui freine considérablement l’accès aux soins des populations, notamment en cas de paludisme où la rapidité de prise en charge s’avère cruciale.

Décryptage des nombreux défis logistiques et financiers à surmonter pour permettre à chaque Ivoirien d’être soigné à temps en cas de contraction du redouté Plasmodium, quel que soit son lieu de résidence. Un combat sans répit pour les autorités sanitaires, aidées par les initiatives citoyennes et de terrain.

Des infrastructures inégalement réparties

Comparé à d’autres pays de la région, la Côte d’Ivoire dispose d’un maillage relativement dense en infrastructures de santé avec plus de 1.800 formations sanitaires répertoriées en 2020. Mais cette couverture cache en réalité de profondes disparités entre les zones urbaines bien dotées et les régions rurales et enclavées souffrant d’un cruel manque d’accès aux soins.

Les chiffres sont éloquents : quand les deux plus grandes métropoles du pays, Abidjan et Yamoussoukro, concentrent à elles seules près de 40% des infrastructures sanitaires, certains districts de l’intérieur des terres comme la région du Guémon, n’en comptent que 5 sur l’ensemble de leur territoire.

L’accès aux soins pour les populations rurales se résume alors bien souvent aux seuls centres de santé ruraux et dispensaires villageois disposant de moyens très limités en équipements comme en personnels soignants qualifiés. En cas de complication nécessitant une prise en charge hospitalière, les délais de transfert par des routes souvent impraticables s’avèrent rapidement critiques, en particulier pour les cas de paludisme grave.

Des contraintes majeures de mobilité

Principal frein à l’accès rapide aux soins, l’éloignement géographique des infrastructures de santé se double de réelles difficultés de transports pour une partie significative de la population ivoirienne.

D’après les dernières enquêtes, seuls 55% des ménages ruraux disposent d’un accès aisé aux transports publics ou privés motorisés. Pour les 45% restants, la seule option pour se rendre dans une formation sanitaire en cas d’urgence réside dans la marche à pied, parfois sur des kilomètres.

Les contraintes s’avèrent encore plus drastiques pour les populations reculées des zones forestières de l’Ouest et du Sud-Ouest. La saison des pluies y rend régulièrement les pistes impraticables durant de longues périodes, isolant totalement certains villages pendant des jours ou des semaines, au risque de laisser des malades sans soins.

Des coûts de santé difficilement supportables

Au-delà des barrières physiques d’accessibilité, la problématique financière constitue un autre obstacle majeur à la généralisation des soins pour les cas de paludisme en Côte d’Ivoire. Malgré les efforts consentis par les autorités, le poids économique des frais médicaux reste difficilement supportable pour une large frange de la population.

Si les actes de consultations sont généralement bien pris en charge par les régimes d’assurance maladie nationale ou les programmes de gratuité ciblés, l’accès aux médicaments antipaludiques se révèle souvent problématique pour de nombreux ménages. Le coût des traitements recommandés comme les combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine dépasse fréquemment les capacités financières, en particulier pour les foyers les plus modestes.

L’envolée des dépenses pour certains soins spécialisés comme les dialyses en cas d’atteinte rénale sévère, contribue à décourager les familles dans ces situations de précarité économique. Le manque de structures adaptées en zone rurale ou enclavée complique davantage l’équation.

L’ultime frein : les facteurs sociaux et culturels

Mais au-delà des obstacles logistiques et financiers, d’autres freins plus ancrés persistent pour entraver l’accès aux soins des personnes souffrant de paludisme. Des facteurs sociaux, éducationnels et culturels puissants à l’origine de comportements par lesquels une partie de la population ivoirienne néglige la gravité de la maladie ou rejette les traitements médicaux.

Les taux d’illettrisme et le manque d’éducation sanitaire dans certaines franges de la population favorisent la méconnaissance des symptômes du paludisme, de ses complications potentiellement mortelles, et du besoin vital d’une prise en charge rapide.

La persistance de croyances ancestrales et de la médecine traditionnelle représente également un frein psychologique puissant. Ces conceptions immémoriales amènent certaines communautés à privilégier les soins auprès des guérisseurs locaux plutôt que de se tourner vers les structures de santé modernes.

Autre phénomène récurrent, en particulier dans les zones urbaines et périurbaines : le recours généralisé à l’automédication par des antipaludiques de rue souvent inadaptés ou contrefaits. Cette pratique à risque contribue dangereusement à retarder ou faire complètement l’impasse sur une réelle prise en charge médicale.

Des stratégies pour lever les barrières

Face à ces nombreux défis qui compromettent l’accès aux soins dans la lutte contre le paludisme, les autorités sanitaires multiplient les initiatives pour tenter de rapprocher au maximum les patients des structures de santé.

Le développement d’un maillage d’agents de santé communautaires formés au plus près des populations dans les zones déshéritées constitue un axe fort avec ses campagnes de dépistage mobiles, d’accompagnement à l’observance des traitements et de suivi des cas à domicile.

La gratuité des soins pour les enfants de moins de 5 ans a également été renforcée dans de nombreux districts sanitaires très touchés par le paludisme grave infantile.

Malgré tous ces efforts, l’accès aux soins pour les cas de paludisme en Côte d’Ivoire reste un défi colossal à surmonter année après année. Un investissement humain et financier substantiel dans le développement des infrastructures, la formation des ressources médicales et la sensibilisation des communautés s’impose comme la seule voie pour sauver des milliers de vies.

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